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La fixation de la rémunération d’un gérant d’EURL : une fixation a postériori

Dernière mise à jour : 29 août 2019


Les magistrats du quai de l’horloge ont eu à se prononcer, le 9 janvier 2019, sur la fixation de la rémunération d’un gérant d’EURL, et plus précisément sur une fixation postérieure à son versement. (1) 


Les faits de cet arrêt rappellent des faits classiques en la matière. L’associé unique et gérant d’une EURL cède la totalité de ses parts sociales et démissionne corrélativement de ses fonctions de gérant. Suite à la cession, la société demande alors le remboursement des rémunérations que l’ancien gérant a perçues au titre des exercices 2008 à 2012, estimant que les décisions les fixant sont irrégulières pour les exercices 2008 à 2010, car postérieures à leur versement.


La Cour d’appel de Toulouse, dans son arrêt du 30 novembre 2016, a rejeté les prétentions de la société, à savoir le remboursement des rémunérations versées.


La Chambre commerciale de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de la société aux motifs que les rémunérations perçues au titre des exercices 2008 à 2010 sont régulières car une décision de l’associé unique, intervenue après la clôture de chaque exercice, a approuvé ces dernières.


Ainsi, la Haute Juridiction vient préciser qu’il importe peu que les rémunérations aient été perçues avant la décision de l’associé unique.


Il convient de rappeler que, face au silence des textes en la matière, la Cour de cassation a précisé que la rémunération du gérant de SARL est déterminée soit par les statuts, soit si les statuts ne précisent pas le mode de calcul de la rémunération du gérant (qu'il soit ou non l'associé), celle-ci est fixée par une décision unilatérale de l'associé unique qui doit être consignée dans le registre des décisions. (2) 


En outre, cet arrêt s’inscrit dans une véritable évolution jurisprudentielle. En effet, assez récemment, la Cour de cassation a fait preuve d’une grande souplesse en précisant que la décision collective des associés qui détermine la rémunération d’un gérant de SARL peut résulter d’une simple signature, par la totalité des associés, d’un rapport mentionnant l’existence de la rémunération et consacre la validité de l’approbation de cette rémunération par les associés après son versement au gérant. (3) 


Cela vient donc laisser au gérant une grande marge de manœuvre en lui permettant de décider seul de s’octroyer une rémunération ainsi que son montant, dès lors que les associés acceptent par la suite de la ratifier. Ainsi, la présente décision vient affirmer la possibilité pour le gérant associé unique d’EURL de fixer a posteriori sa rémunération.


Néanmoins, cette décision et cette pratique doit être nuancée car elle comporte certains risques.

En outre, une telle pratique pourrait augmenter le risque pour le gérant de tomber sous le coup d’un abus de biens sociaux si la rémunération versée est contraire à l’intérêt social.


Si une telle décision permet pour le gérant associé unique d’une EURL de palier à certains manquements quant à la fixation de sa rémunération par décision de ce dernier, il semble opportun de considérer qu’une fixation préalable a tout versement doit demeurer la procédure à suivre.


Il convient également de rappeler que cette fixation à postériori doit malgré tout respecter le principe posé par l’alinéa 3 de l’article L. 223-31 du Code de commerce. Ainsi, les décisions venant fixer la rémunération du gérant associé unique doivent impérativement être consignée dans le registre des décisions. (4) 


L’alinéa 4 dudit article précise qu’à défaut de non consignation des décisions dans le registre, la nullité de ces dernières pourra être demandée par tout intéressé. Il s’agit ici d’une sanction pouvant être lourde de conséquence pour le gérant associé unique en cas de cession de la totalité de ses parts sociales, mais également pour son conseil qui doit veiller au respect et à la bonne tenue des registre en cas de cession.


 

(1) Cass, Com., 9 janv 2019, n°17-18.864


(2) Cass, Com., 25 septembre 2012, n°11-22.754


(3) Cass, Com., 15 mars 2017, n°14-17.873


(4) Article L. 223-31 du Code de commerce



réf. : BONNET (C.), "La fixation de la rémunération d’un gérant d’EURL : une fixation a postériori", Doctrin'Actu février 2019, art. 38

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