La réforme du dispositif Dutreil par la loi de finances pour 2019 - Synthèse
Dernière mise à jour : 16 mai 2020

L’exonération partielle Dutreil permet, si certaines conditions sont réunies, de transmettre une entreprise familiale en bénéficiant d’une exonération de droits de donation ou de succession des ¾ de sa valeur. La transmission n’est donc imposée que sur ¼ de la valeur de l’entreprise (ou des titres de la société).
L’article 787 B du Code Général des Impôts (CGI) régit l’exonération applicable aux titres de sociétés et l’article 787 C du CGI celle applicable aux entreprises individuelles.
L’article 787 B a connu d’importantes modifications à l’occasion de la loi de finances pour 2019.
Quelles sont les principales modifications apportées au dispositif ?
1- Les seuils requis pour conclure un engagement collectif de conservation sont abaissés lorsqu’ils concernent les droits financiers
Auparavant : les associés souhaitant conclure un engagement collectif de conservation devaient détenir ensemble 20% (sociétés cotées) ou 34% (société non cotées) des droits financiers et des droits de vote ;
Pour les pactes conclu à compter du 1er janvier 2019 : l’engagement collectif devra porter sur 20% des droits de vote et 10% des droits financiers (sociétés cotées) ou 34% des droits de vote et 17% des droits financiers (sociétés non cotées).
Cet abaissement a pour objectif de faciliter la souscription d’engagement collectif de conservation par les titulaires d’actions à droit de vote double.
La mise en œuvre de ces seuils sera toutefois souvent délicate.
2- Possibilité pour un associé seul de souscrire un engagement collectif
La possibilité de souscrire un « engagement individuel collectif » ne manquera pas de faire sourire (et de souligner le manque d’intelligibilité du dispositif…).
Pourtant la réforme est bienvenue, tant elle présente d’utilités :
Il pourra être utile même dans les hypothèses où les conditions pour bénéficier de l’engagement réputé acquis sont réunies : en effet ce dernier impose que l’un des donataires exerce une fonction de direction, ce qui ne sera pas toujours possible. Cette condition n’est pas requise lorsqu’est signé un « engagement individuel collectif » ;
Il permet d’ouvrir l’exonération aux holdings non animatrices qui détiennent seules, à 100%, la société cible.
Auparavant, ces holdings ne pouvaient ni signer un engagement collectif de conservation ni se prévaloir d’un engagement réputé acquis ;
Il permettra aux sociétés unipersonnelles dans lesquelles les conditions de l’engagement réputé acquis ne sont pas réunies d’éviter l’application, très problématique, du régime de l’article 787 C [1].
Modalités de souscription :
Le formalisme requis est le même que pour l’engagement collectif « classique » : acte notarié ou sous seing privé enregistré.
Quant aux conditions de fond, le signataire doit détenir seul [2] les seuils requis et exercer une fonction de direction ou son activité principale.
Entrée en vigueur : cette disposition s’applique aux pactes conclus à partir du 1er janvier 2019.
3- Extension de l’engagement collectif réputé acquis aux concubins notoires
Les titres détenus par les concubins notoires seront, comme pour ceux détenus par les époux et partenaires pacsés, pris en compte pour l’appréciation des seuils et la fonction de direction pourra être exercée par l’un ou l’autre des concubins.
4- Les modalités des family buy out assouplies
Le législateur apporte plusieurs modifications bienvenues qui simplifient la réalisation d’un « FBO » :
Les titres donnés avec le bénéfice de l’exonération partielle Dutreil pourront désormais être apportés à une holding tant pendant la phase d’engagement collectif (impossible auparavant) que pendant la phase d’engagement individuel ;
Les conditions tenant à l’objet et à l’actif de la holding sont assouplies : la première est purement supprimée, et l’actif de la holding devra être composé à plus de 50% (contre exclusivement antérieurement), de titres de la société dont les titres sont soumis à engagement ;
La holding pourra détenir non seulement des titres de la société cible (dont les titres sont soumis à engagement), mais également des titres de sociétés interposées ;
Le capital n’a plus à être détenu exclusivement par les donataires ayant bénéficié de l’exonération partielle, mais seulement à 75% ;
La direction de la holding pourra désormais être exercée par l’un des donataires ou par un signataire de l’engagement collectif de conservation.
5- Modifications concernant les sociétés interposées
Les transmissions de titres de sociétés interposées pourront désormais bénéficier de l’engagement réputé acquis lorsque la société interposée détiendra les titres de la société cible depuis plus de deux ans ;
Une condition supplémentaire est ajoutée en cas de transmission de titres de sociétés interposées : ces dernières devront conserver les titres de la société cible jusqu’à l’expiration de l’engagement collectif individuel.
6- Allégement des obligations déclaratives
L’obligation d’adresser à l’administration fiscale une attestation annuelle pendant toute la durée des engagements (collectif et individuel) est supprimée ;
En revanche le donataire ou héritier devra, dans les trois mois suivant la fin de son engagement individuel adresser spontanément une attestation délivrée par la société et certifiant que les conditions ont été réunies jusqu’à leur terme.
[1] En effet, dans les sociétés unipersonnelles, le bénéfice du régime Dutreil défini à l’article 787 B suppose que les conditions de l’engagement réputé acquis soient réunies. A défaut, il est fait application de l’article 787 C, propre aux entreprises individuelles, et cette application n’allait pas sans difficulté.
[2] Les titres détenus par la cellule familiale ne sont pas pris en compte.
rfé. : DE LOS SANTOS (M.), "La réforme du dispositif Dutreil par la loi de finances pour 2019 - Synthèse", Doctrin'Actu février 2019, art. 36